(Lomé Actu) – La suspension des deux médias français, RFI et France 24, se poursuit au Togo bien au-delà du délai initial de trois mois annoncé par la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC). Une décision qui suscite interrogations et débats, aussi bien dans l’opinion publique que dans les milieux diplomatiques.
Une suspension prolongée au nom de la régulation
Le 16 juin 2025, la HAAC avait décidé de suspendre les diffusions de RFI et France 24, accusant ces chaînes de violations répétées des règles journalistiques : manque de vérification des faits, couverture jugée partiale et absence de responsabilité éditoriale. La mesure, initialement limitée à trois mois, devait prendre fin le 16 septembre. Pourtant, les signaux n’ont pas été rétablis.
Pour les autorités togolaises, il ne s’agit pas d’une censure, mais d’une application stricte des lois nationales qui encadrent le paysage médiatique.
Un alibi juridique ?
Au-delà de la polémique sur l’impartialité, un point juridique majeur pèse sur l’affaire : l’autorisation de diffusion FM de RFI au Togo est arrivée à expiration en novembre 2022. Depuis, la radio continue d’émettre sans cadre contractuel valide.
Cette irrégularité renforce la position du gouvernement togolais, qui exige un renouvellement officiel assorti de nouvelles conditions de diffusion.
Entre souveraineté et diplomatie
Pour Lomé, ce dossier n’est pas qu’une question technique. Il s’agit aussi d’une affirmation de souveraineté. Le Togo veut rappeler que les médias étrangers, même publics et internationaux, doivent se conformer aux règles du pays hôte.
D’ailleurs, dans une logique de réciprocité, les autorités togolaises ont proposé qu’une station locale bénéficie d’un accès FM en France pour sa diaspora — une demande encore en suspens.
Un contexte africain plus large
La suspension de RFI et France 24 au Togo s’inscrit dans une tendance observée dans plusieurs pays d’Afrique francophone (Mali, Burkina Faso, Niger). Ces médias, perçus comme trop critiques ou liés à l’influence française, sont régulièrement écartés des ondes locales.
Pour certains analystes, le Togo rejoint ainsi un mouvement de remise en cause de l’hégémonie médiatique française sur le continent.
Les Togolais privés… mais pas totalement
Malgré la suspension sur les ondes et la télévision locales, RFI et France 24 restent accessibles via internet, applications mobiles et satellites. En pratique, la coupure touche surtout les auditeurs traditionnels et les zones rurales.
Mais pour beaucoup de fidèles auditeurs, cette absence sur la bande FM représente un vide symbolique : la perte d’une source d’information qu’ils considéraient comme indépendante et internationale.
Et maintenant ?
Officiellement, la HAAC promet de « réexaminer » la situation, mais sans calendrier précis. Tant que le contrat de diffusion n’est pas régularisé et que les griefs éditoriaux ne sont pas levés, il est peu probable que RFI et France 24 retrouvent rapidement leurs fréquences au Togo.